samedi 26 octobre 2013

Cinéma - Critique : "Gravity", Alfonso Cuarón

Gravity : un jeu d'équilibre parfait


Gravity, c'est la puissance même. En l'espace de quelques secondes le cinéaste nous met en condition. Assis sur votre fauteuil, les premières phrases à l'écran nous révèlent que l'espace est cet endroit angoissant où aucun son ne sort. Vous n'entendez rien, rien ne peut vos parvenir. Une fois prévenu, le spectateur s'attend alors à un silence des plus profond. Prenez garde, c'est là qu'intervient la première gifle de l'auteur. Un son perçant de quelques secondes vient vous condamner à une surdité pour les prochaines minutes.

Loin d'être muet, le film vous condamne pourtant à une certaine mutité. A chaque instant, à chaque seconde le spectateur est sous tension. Tout est possible dans un des récits des plus simples. L'histoire se résume en quelques mots : les débris d'une station russe menacent celle de nos protagonistes, et il s'agit de rentrer au plus vite à l'abri. Bien sûr, cela ne va pas se passer comme prévu. Georges Clooney, grande star Hollywoodienne va très vite sortir de l'écran. Il s'agit donc d'un certain pari pour l'auteur, qui se révèle être d'une audace réussie. Sandra Bullock, que l'on at très peu vue récemment au cinéma, devient donc rapidement seule personnage du récit. Mais finalement, l'acteur principal de l’œuvre devient l'espace. C'est lui qui va jouer le plus grand rôle.

Souvent décevante, la 3D est ici satisfaisante et surprenante vis-à-vis de l'ampleur que cela donne au film. Le risque avec la technique est d'en faire trop, de démultiplier les effets, et de rendre ainsi le spectateur nauséeux. Le cinéaste nous montre qu'il n'en faut que très peu pour que la 3D fasse son effet. Deux, trois éléments suffisent, et c'est finalement bien assez. La 3D vient remplir un rôle très important au cinéma ici qui est l'effet d'immersion. Pendant près de 90 minutes, le spectateur est transporté dans l'espace, au dessus de la terre ferme, oubliant sa position matérielle même qui est d'être assis dans son fauteuil.

La tension est palpable à chaque instant. Nous devenons Sandra Bullock, nous prenons peur, nous hallucinons, tout comme elle. On s'inquiète, on s'énerve quand cela ne marche pas. Tout est dans le film. L'effet d'immersion est complet et incroyable. Le format de 90 minutes ne rend pas la séance trop longue, et nous permet encore une fois d'être concentré à chaque moment. Les effets spéciaux, magistraux, sont d'un réalisme sans nom, et nous donne une telle impression que nous en transpirions presque.

Pour ainsi dire, le film est un chef d’œuvre. Une balance incroyable entre 3D, durée du film, effets spéciaux, et pari risqué d'un film à personnages limités. S'ajoute à cela une fin qui ne fait pas dans le dramatique, et qui nous donne des frissons dans le dos.


J'achète, et j'en redemande.

Marie Schrobiltgen
L3 Lettres & Arts  

Cinéma - Critique : "Alabama Monroe", Felix Van Groeninger

Il est parfois difficile de s’extraire d’une œuvre. Tellement difficile que les jours qui suivent, semblent gris et indifférents. Vous avez véritablement du mal à redevenir, à renaître. Le brouhaha du métro vous écorche les oreilles, le moindre contact des passants ressemble à un coup, vous êtes à fleur de peau et tout vous fait mal. Le réel est alors un Autre, intenable, une enveloppe qui vous est indifférente.

Alabama Monroe fait partie de ces films.

Il nous parait périlleux de ne parler que de l’histoire mais après tout c’est notre rôle.
Imaginez un amour nouveau, incontrôlable, et brûlant. Imaginez deux êtres parfaitement différents, l’un passionné de Bluegrass, musique toute droite sortie d’une Amérique fraîche et porteuse de rêves, l’autre, artiste marquant son corps au gré de ses envies, aux prises d’une liberté sensible. Ils s’aiment. Ils vivent, à travers leur musique et leur voix, une passion créatrice prête à tout dévaster. Et de cet amour naît Maybelle. Le début de l’été.

Dans leur grande demeure en périphérie de la ville, ils s’imaginent tous les trois une vie douce et lisse, pleine de couleurs chaudes. 




Et Maybelle tombe malade.



Le montage en alternance permet au spectateur de sortir du film Hollywoodien classique ; Eros et Thanatos sont ainsi indéniablement liés. L’amour et la mort viennent du même puit. Ils sont issus de la même force vitale inépuisable. Nous sommes alors en permanence confrontés à une joie intense et à une douleur innommable.
Tout déraille et s’essouffle. Comment vivre l’invivable ? Comment surmonter l’insurmontable ?


Le jeu impressionnant de Veerle Baetens et de Johan Heldenbergh permet ce réalisme à toute épreuve et cette identification. Nous sommes eux, nous vivons ce qu’ils vivent. Leur naturel fait du bien, car il est particulier de voir de nos jours, sur grand écran, deux personnages qui ne sont pas des modèles à suivre, sinon véritablement des personnes. Des identités à part entière.

Felix Van Groeninger signe ici, après La merditude des choses, un chef d’œuvre, n’ayons pas peur des mots, un film d’une rare sensibilité, qui vous hantera longtemps.
Et cela fait du bien.

Emma Menetrey
L3 Lettres & Arts

vendredi 25 octobre 2013

Série - Critique : "Once upon a time in wonderland" (ABC)

« Once upon a time in wonderland » ou la conception de l'horreur par ABC


Le 10 Octobre dernier, la chaîne américaine ABC dévoilait le spin off de « Once upon a time ». On nous avait prévenu, l'idée serait très clairement basée sur l'histoire de la mythique Alice au Pays des Merveilles. Difficile de savoir ce qu'il s'est passé dans la tête des producteurs à ce moment là. Car vous le savez tous, adapter le roman de Lewis Carroll, c'est comme sauter d'un avion avec un parachute troué.

La série qui découle de ce spin off c'est « Once upon a time » : un concentré de toutes les contes et légendes de notre enfance. De Blanche Neige à Pinocchio en passant par le Chapelier fou, la série raconte les aventures de ces personnages de fiction, transportés dans une ville « réelle » d'Amérique, et condamnés à l'oubli de ce qu'ils sont réellement.

La série mère fait donc de nombreux bond entre monde réel et univers imaginaire. La première mise en scène, celle du monde réel, est assez bien réussie, puisque peu de budget est nécessaire à son fonctionnement. La seconde, celle d'un univers imaginaire, fait peur à voir. La première saison de « Once upon a time », assez réaliste, est donc encore assez plaisante pour nos yeux, puisque les passages à l'univers imaginaire ne se font que très rares. Cependant, de saison en saison, ceux-ci se font de plus en plus souvent, et avec l'arrivée de la « magie » dans le monde réel, on est carrément dans la catastrophe télévisuelle. Alors le pari du nouveau spin off basé entièrement sur un monde imaginaire était très risqué.

Pari perdu. Le pilote de « Once upon a time in wonderland » m'a fait froid dans le dos. La série mère aura toujours une place dans mon petit cœur, il est vrai, car elle nous propose une série sympathique pour toute la famille, en reprenant tous les personnages de notre enfance qui nous ont fait tant rêvés. Mais là, une adaptation télévisuelle de Alice au Pays des Merveilles, je dis non ! Non, non et non. Les effets spéciaux sont une horreur sans nom pour les yeux, les personnages n'ont rien à voir avec ceux de Lewis Caroll, et l'histoire, mon dieu l'histoire, est tout bonnement imbuvable. Une énième histoire d'amour entre une jolie petite fille et un magnifique prince charmant, nous n'en voulons plus ! Certes, il est toujours bon de s'éloigner de l'histoire originale, mais ce n'est pas pour autant réussi. Seul le petit lapin m'aura fait sourire dans ce premier épisode – il est vrai qu'il est tout de même très mignon ce petit lapinou. Et a mon grand dam, nous retrouvons l'acteur de l'incroyable série « Lost », Naveen Andrews... On se demande ce que l'acteur vient faire ici, dans cette série qui n'a aucun avenir et qui fera plus pleurer que rire les enfants.

Pour ce qui est de la critique Américaine, je vous avoue que je n'y comprends rien. Le Los Angeles Times parle d'une « qualité des effets spéciaux », et va jusqu'à qualifier les oreilles du Lapin Blanc comme étant un « chef d’œuvre » - oui oui, un chef d’œuvre mesdames et monsieur. Toujours selon le journal, les dialogues seraient « brillants », avec des « twists intelligents », et avec « cerise sur le gâteau, une ambiance steampunk ». Waoh, tant que ça ! Je suis tout de même plus de l'avis du journal Newsday qui affirme qu'avec une esthétique guimauve, la série nous montre tellement d'éléments à l'écran, que l'on ne sait pas ce qui va se développer au long de la série.

Faites-vous votre propre avis mes amis, n'hésitez pas à me contredire !

Marie Schrobiltgen
L3 Lettres & Arts


mercredi 23 octobre 2013

Théâtre - Critique : Amalia, respire profondément




Amalia, respire profondément



Au théâtre des déchargeurs se tient en ce moment et jusqu’à fin novembre, un conte d'hiver haut en couleurs, retraçant l'histoire compliquée et trop souvent méconnue de la Roumanie.
Amalia respire profondément, monologue d’une heure et demi, est une invitation au souvenir, à l'anecdotique à tout ce qui tient du fragile écart entre histoire, la petite personnelle, et la grande, l'Histoire, H majuscule découpant cruellement parfois un peuple, un pays.
Amalia (interprétée par Codrina Priscoaia), le personnage que nous suivons de ses 6 à ses 70 ans dans 5 étapes constitutives de sa vie, porte sur le monde qui l'entoure, à savoir la dictature communiste de Ceaucescu, un regard qui se veut naïf et qui dénonce avec un certain humour cependant, l'horreur d'un pays en crise. On la juge peut être simple ou déraisonnable (notamment en vouant un véritable amour à son cochon domestique), mais qui peut garder raison dans un monde devenu fou ? Et peut être est-ce encore le plus fou qui voit le plus juste. Ou encore cette folie n'est elle qu'un masque pour se protéger de la souffrance, de la mort qui frappe partout, du froid et de la faim ? Moyen ou masque, les sentiments et les mots d’Amalia, eux, sont bien réels. Et ils nous touchent.

La mise en scène minimaliste de Bobi Pricop, joue essentiellement sur une lumière qui tangue et déforme le corps de la comédienne devenant informe, immatérielle, faisant penser aux ombres chinoises qu'on s'amuse à créer dans l'enfance, jeu de création, de re-création. L’aspect créatif de réinvention de forme a une place particulièrement importante dans cette pièce où la question du rêve flotte tel le voile blanc dans l'arrière scène.
Le texte travaille aussi sur la même interrogation que Calderon dans « La vie est un songe », c'est à dire la question de la fragile nuance entre vie et réalité, et l'impression que la vie passe comme un rêve d'où parfois l'on se réveille esseulé, rassuré. Or, dans le cas présent, on est davantage face à un cauchemar, celui d’un peuple laissé aux griffes d’un monstre duquel on s’arrache difficilement.
Apprendre à respirer, à s’élever sera la clef de la survie d’Amalia, le message qu’elle nous transmet peut être, et son souffle passe dans la salle glaçant mais vivant, preuve indéniable que la vie continue.

On pourrait parler de la musique singulièrement importante, qui ne tranche pas, elle aussi laissant le choix au spectateur de penser librement, du rire jaune qui parfois nous anime au détour d’un « pic » lançé par Amalia. On pourrait parler de l’étrange sentiment de culpabilité déplacée qui nous envahit en sortant de la salle, le sentiment d’avoir ignoré tellement de choses si longtemps, et d’être encore loin de les connaître pleinement… Mais la pièce parle mieux que nous et la meilleure chose à dire est de vous inviter plutôt deux fois qu’une à courir au théâtre des déchargeurs et à vous laisser à votre tour habiter par la sombre voix d’Amalia !




Emma Menetrey
L3 Lettres & Arts

mardi 15 octobre 2013

Théâtre - Critique : Dyptique Fassbinder


Dyptique Fassbinder
Anarchie en Bavière/Liberté à Brème


L'automne théâtral est marqué cette année par plusieurs mises en scène des pièces du dramaturge contemporain Rainer Werner Fassbinder. Dans ce contexte, il est possible d'être enjoué à la vue des mises en scène de Gwenaël Morin au Théâtre de la Bastille dont le diptyque Anarchie en Bavière – Liberté à Brême est sans doute un bon témoin de l'Intégrale « Antithéâtre » ainsi nommé par le metteur en scène et contenant (en plus de ce diptyque) Village en Flammes et Gouttes dans l’Océan.

Ce qui détonne et étonne d'emblée, c'est le jeu et l'écart entre le texte et ce que les acteurs en font sur le plateau. Cet écart donne libre cours à un second degré désopilant qui n'empêche absolument pas l'authenticité, au contraire.

La scène est vide, les acteurs manquent de costumes, d'accessoires, de décors et de coulisses et pourtant le théâtre se fait. Nous voyons le théâtre en train de se faire. Les acteurs sortent de leur non-jeu comme d'une coulisse, laissant ainsi au public la satisfaction de voir leur propre mise en jeu. Une femme trimbale son "Fassbinder" avec elle sur la scène et énonce les didascalies en présence de l'action en cours comme le ferait un metteur en scène en plein exercice de troupe. Le jeu d'acteur apparaît donc comme une réponse et une solution au problème posé par le texte. Il est chargé d'authenticité, c'est une spontanéité s'enracinant dans le présent de la salle et inventant avec elle.

Crédits photo : ©Marc Domage
 Il ressort de ce système de jeu (qu'il est impossible de ne pas rapprocher de la dramaturgie brechtienne) comme un sentiment de partager avec le public et les acteurs un sentiment de liberté d'action et de réaction. Comme si ce qui se passait entre les acteurs mettait aussi en jeu le spectateur. Il se sent libre de juger, d'imaginer, de rire, de pleurer et cela fait du bien.

Si la première pièce jouée (Anarchie en Bavière) bénéficiait d'un effet de surprise, la seconde, Liberté à Brème, jouée selon le même procédé, laisse à désirer. En effet, au vu de ce qui a déjà été fait, on regrette de ne pas être surpris à nouveau par une prise de partie radicale. La tension n'est pas renouvelée et l'attention se dégonfle comme un soufflet, à bout de souffle.

En fin de compte, c'est comme s'il s'agissait plus de l'authenticité et de la spontanéité du jeu d'acteur que de la fable écrite par l'auteur. Les pièces de Fassbinder tiennent des propos dont on ressent la teneur politique mais la mise en scène de Gwenaël Morin ne les soutient pas suffisamment pour provoquer chez le public une petite révolution brechtienne. On ressort de la salle tout enjoué de théâtralité tout en se demandant si la pièce a bien joué son rôle dans nos têtes.


Théodore Bompy
L3 Lettres & Arts

lundi 7 octobre 2013

Welcome to the Blog



Bienvenue ! Welcome ! Bienvenido ! 
Benvenuto ! Willkommen ! 你好 ! こんにちは ! 
Bref. 

Bienvenue à tous sur le blog du BDE "Lettre Aimé
des sections Lettres de l'Université Paris VII Diderot

Ce que nous allons proposer sur ce blog n'est pas seulement une présentation chronologique des différents évènements qui vont rythmer notre vie universitaire au sein du BDE. 
Ce blog sera aussi un lieu de partage et de discussions culturelles autour de lectures, pièces de théâtre, spectacles, concerts, albums, films et autres billevesées qui rendent notre vie monotone bien meilleure. De fait, vous disposerez sur ce blog d'un agenda culturel organisé par les différents membres du BDE ainsi que les différentes chroniques qui s'y rapportent. 
Peut-être seront parsemés quelques bonus / excès en tout genre au sein de doux billets provocateurs responsables de futurs conflits d'états, de sexes et de religions...

Seul l'avenir vous le dira. Alors n'hésitez pas à suivre régulièrement l'actualité du blog et à vous manifester ! 
Lecteurs : chacun de vous peut devenir l'être aimé participer à l'évolution de ce projet. 


-Le BDE