La Barque au Soir
En ce moment au
Centquatre est mis en scène la pièce de Tarjei Vesaas , La
Barque au soir par Claude Régy. Le spectacle commence avant le
spectacle. D’ores et déjà, le metteur en scène place le
spectateur dans un certain état d’esprit. Avant même notre
entrée dans la salle, un jeune homme vient nous annoncer que pour
Régy l’entrée dans la salle fait partie intégrante du spectacle
et qu’il est donc demandé que l’on fasse notre entrée dans le
silence. Ainsi, le spectateur entre dans une phase de recueillement,
personne ne parle (à part les quelques rebelles qui parsèment le
public). Regy met en place une idée de théâtre presque sacralisé,
c’est dans le silence et la pénombre que commence le spectacle.
De très beaux jeux de
lumière, éclairent plus ou moins le corps du comédien, et la
scène. Le décor est très minimaliste une estrade très peu haute
en moquette blanche se teinte au fil des éclairages en bleu ou en
rouge ; et un simple voile noir qui d’apparence ressemble à
une structure en dur, se dévoile peu à peu, laissant apparaître un
autre espace où se dessinent avec une grande beauté dans une lumière
rouge deux autres corps d’hommes qui marchent très doucement l’un
vers l’autre. On retrouve bien l’esthétique de Régy, des mots
dits très lentement, insistant sur certaines syllabes. Le spectateur
a le temps de percevoir chacun des mots. On peut imaginer cela comme
assez déroutant voire déplaisant et pourtant, le spectateur est
vite pris dans l’esthétique du metteur en scène. La performance
de l’acteur est impressionnante. Il est du début jusqu'à la fin
dans son rôle, le texte apparait comme éprouvant, les silences, les
mimiques de son visage donnent l’impression que les mots ont du
mal à sortir. Le comédien ne se déplace pas sur la scène ses
pieds semblent comme littéralement cloués au sol, mais tout son
corps est en mouvement. Les gestes sont aussi lents que les mots. La
sueur qui perle sur son visage ne laisse pas de doute quand à
l’éprouvante performance de l’acteur qui semble presque rentré
dans une sorte de transe. Régy, décrit son théâtre comme un
théâtre de la non représentation, il ne représente pas mais il
présente, une présentation au sens de performance de l’acteur.
Régy fait une entreprise phénoménologique, le spectateur n’est en
aucun cas passif, il travaille, ce n’est qu’à cette seule
condition qu’il pourra vraiment entendre le texte et laisser
travailler son imagination. L’objet
ne se donne jamais tel quel et il faut faire l’effort de le saisir
pour voir ce qui en lui fait l’objet. Grâce au jeu
d’acteur de Nichan Moumdjian, le spectateur est totalement pris par le spectacle, il
entre dans un état hypnotique qu’il doit travailler à accepter.
Certains en ressortent bouleversés. A la fin une petite dizaine
reste assis sur leur chaise, les yeux dans le vague comme s’ils
avaient une difficulté à en ressortir, perpétuant le silence voulu
par le metteur en scène. Dans L’ordre des mots Régy
définit son esthétique ainsi « ce n’est pas un rêve
mais c’est la substance du rêve, l’ordre n’est plus établi et
ce que nous prenions pour la réalité est perdu ».
Perrine Mériel
L3 Lettres et Arts
Perrine t'ecris vraiment comme une déesse si seulement je pouvais ecrire aqussi bien que toi j'ai hate de voir la pièce grace a toi et ta plume de pure ecrivain.
RépondreSupprimerNora