lundi 2 février 2015

Théâtre - Critique : Third World Bunfight – Macbeth de Brett Bailey

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Espace Lino Ventura, Torcy – Le 27 novembre 2014

Après House of the Holy Afro et Exhibit B la saison précédente, Brett Bailey revient avec sa compagnie Third World Bunfight, en Ile de France pour nous présenter sa nouvelle création Macbeth. Macbeth a une dynamique tout à fait différente de House of the Holy Afro. Le chant est là encore très présent mais les couleurs musicales de l’Afrique s’effacent pour laisser place à l’opéra italien de Verdi. Cet opéra n’est pas nouveau pour Brett Bailey, puisqu'il l'avait déjà travaillé « pour une troupe d’opéra locale, qui était assez conservatrice, avec des orientations commerciales ». Le metteur en scène dit alors avoir voulu cette année, monter cette pièce à « sa manière », avec une troupe plus modeste, 10 chanteurs/acteurs, et un orchestre plus réduit composé d’une dizaine de musiciens dirigés par Fabrizio Cassol.

L’opéra italien vient chez Brett Bailey faire écho à la douloureuse histoire de l’Afrique Noire. Il fait une réactualisation qui déplace Macbeth dans l’histoire de la République Démocratique du Congo des années 35-45. La fiction se mêle alors à la réalité, les tueries de l’histoire viennent résonner dans celle de l’Histoire. Dans cette pièce le rire vient côtoyer le drame. Le spectateur rit à plusieurs reprises, Brett Bailey joue énormément sur la parodie des chefs de milices africains qui veulent accéder au pouvoir. Le rire n’efface pas pour autant le drame de l’histoire. Cet opéra est bouleversant et profond, les spectateurs ne parviennent plus à distinguer si les larmes des acteurs sont fausses ou bien réelles. 

Ce spectacle n’est donc pas qu'un simple divertissement, il pousse les spectateurs à réfléchir. Brett Bailey dit s’intéresser à : «Dans le conflit du Congo, qui entretient le feu de la guerre ? », à ces multinationales représentées dans la pièce par les trois sorcières, qui financent les milices pour avoir accès aux ressources minières du Congo. Des images chocs parcourent le spectacle. Brett Bailey a su à merveille découper l’opéra de Verdi pour délivrer son message. Ainsi, la fin de la pièce ne se termine pas sur le couronnement de Malcolm comme chez Shakespeare mais sur la mort de Macbeth. Par ce geste, il cherche à montrer que dans les pays tels que le Congo il est difficile d’avoir un « Happy End », « chaque fois qu’une milice est vaincue, une autre apparait – le serpent a plusieurs têtes ». Son théâtre relève presque du théâtre documentaire, il accompagne sa pièce de textes expliquant la situation du Congo dans les années 35-45. Grâce à des acteurs hors du commun menés par le couple d’époux Macbeth (Owen Metsileng et Nobulumko Mngxekeza), Brett Bailey a la capacité incroyable de passionner le spectateur, de l’amuser, et de l’émouvoir en même temps. 

Pour ceux qui parmi vous ont raté cette représentation, la pièce sera en tournée en Nouvelle Zélande en mars, le billet risque juste de coûter un peu plus cher !


Brett Bailey / Third World Bunfight -Macbeth
Nouveau théâtre de Montreuil, centre dramatique national
18 au 22 novembre

Perrine Mériel

Master 1 Littérature, Arts et Pensées contemporaines

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