lundi 2 février 2015

Cinéma - Critique : Mommy de Xavier Dolan

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Je voudrais commencer cette critique par la fin (sans aucun spoil, bien sûr); par le ressenti post-ciné, l’instant tout frais où l’on sort de la salle et où l’on se laisse guider par nos pensées en marchant sur le quai de la gare jusqu’au métro. C’est comme si on avait essayé de me réveiller en me secouant violemment les épaules, me giflant, me lacérant le visage. C’est les jambes encore flageolantes que je rentre chez moi, et il m’est alors impossible de dire autre chose que “je suis allée voir Mommy, c’était super”.

Et pourtant, je n’y tenais pas. Blasée de l’émulation générale, saoulée que le film occupe deux salles au MK2 Bibliothèque ou au Quai de Loire, exaspérée que le petit Dolan construise sa bande annonce autour de son si-beau-discours à Cannes. 
J’ai failli passer à côté.


Xavier Dolan, 25 ans, 5 films au compteur. Ce n’est pas le cinéma “français de France” qui offrirait ses chances à un gamin, si talentueux qu’il soit. Par chance, il est québécois, et ose se donner les moyens d’imposer sa créativité, je dirais même son art, jusqu’à Cannes, jusque faire les grosses sorties françaises.
Cinq ans après J’ai tué ma mèreMommy reprend le sujet des relations mère-fils. Steve, adolescent violent et impulsif, retourne vivre chez sa mère (électron libre, la superbe Anne Dorval) après s’être fait exclure du centre spécialisé où il était placé. Pèse sur lui la menace implicite de la loi S-14, qui autorise une mère à placer en hôpital son enfant atteint de maladie physique ou mentale.

Dolan traite avec délicatesse une relation amour-haine, entre grossièreté, vulgarité et passion violente. L’entrée en scène parfaitement réussie de Kyla, enseignante en congé sabbatique, apporte une certaine douceur, une tendresse un peu énigmatique. Trois personnages incompatibles qui forment la parfaite fusion de la pudeur, la disgrâce et l’amour. J’irai même jusqu’à parler d’une ambiguité amoureuse légèrement dingue, mais toujours saine, toujours traitée avec la même sensibilité.

Il me semble également essentiel de mentionner un jeu d’acteur parfaitement juste, qui nous prend à la gorge. Imaginez que le jeune Steve colle son front au vôtre, vous regarde droit dans les yeux et se met à rire cyniquement, à pleurer de colère, à vous caresser doucement la joue et à vous insulter en hurlant.

Ajoutons une bande originale limpide, entre Oasis et Lana Del Rey en passant par Dido, Ludovico Einaudi et Counting Crows.
En bref, ne le manquez pas (vous avez de la chance, il va sans doute rester un petit moment en salle !)

Lili Nyssen, 
L1 Lettres et Arts

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